Le mois de la gratte

Le mois de la gratte

Après deux pleines journées de leçons, à entendre le même discours évident, « en ce moment je fais des tas de grattes », il fallait bien me rendre à l’évidence ; on était bien, en plein mois du divot incontrôlé. Après l’éphéméride et les grands froids, était arrivé le mois de la gratte.

« Alors docteur, c’est quoi mon problème ? Parce que ‘en ce moment ça me gratouille »

Tentons une définition.

De l’anglais « fat shot », le phénomène est bien connu des golfeurs du monde entier.

Le club, pendant son retour vers la cible, rencontre la grosse sphère «la terre», plutôt que la petite «la balle».

Je devrais écrire ici, « plus tôt », tant l’énorme quantité de terre et d’herbe est projetée en premier, suivie de très près par la balle, qui, manquant « d’un bon coup de pied aux fesses », a bien du mal à avancer plus vite que son compagnon de voyage, le divot.

Vous la connaissez, cette situation peu glorieuse, où le divot va plus loin que la balle qui reste à vos pieds.

Ce mois si particulier a ses caractéristiques, ses codes, ses couleurs.

Votre parcours préféré sort péniblement de sa période d’hibernation, et les sols passent de l’état de banquise aux marécages sans prévenir. Les premiers rayons malins de soleil attendrissent le fairway, sans encore autoriser l’arrivée de l’herbe.

Ainsi, votre balle, superbement frappée, retrouvant à coup sûr le milieu du fairway, s’immobilise, légèrement souillée par cette terre argileuse, là au milieu du parcours.

Vous ne pouvez être en meilleure position.

Une fois essuyée et replacée (c’est la règle à cette époque), vous n’avez plus qu’à la frapper, de votre plus beau swing.

Sans crainte, l’horizon est dégagé, la cible accueillante.

Le danger est caché, blotti sous votre balle attendant votre angle d’attaque irrégulier.

Votre swing de tapis prendra d’abord son premier contact quelques centimètres derrière la balle, juste assez pour qu’au lieu de rebondir ou glisser, il se plante laborieusement puis resurgisse à vitesse modérée vers la balle.

La trajectoire est décevante, irritante, entêtante.

Mais la balle a avancé un peu, à vous de faire mieux et plus précis au coup suivant.

Alors, en grand technicien, vous changez de stratégie.

Le coup suivant sera tapé en descendant, bien vertical.

Fini les coups brossés, jouons la pincée.

Hélas, le projet est ambitieux, mais bien trop sensible pour votre mécanique encore rouillée.

Présentant l’arête du club en premier, votre swing va, tel un marteau piqueur, sonder les profondeurs du fairway.

La balle sera parfois évitée, souvent « socketée », au mieux écrasée, réagissant à la violence de l’impact par une trajectoire rasante et fuyante.

Dans vos mains, la vibration du shaft restera présente encore quelques instants.

Alors que choisir, en la lèche un peu épaisse, du plus beau des brosseurs ou la hache tout en finesse du bûcheron.

La réponse se trouve bien sûr chez votre pro, qui va redoubler d’ingéniosité pour vous apprendre ce swing, parfaitement dans le plan, à l’angle d’attaque idéal permettant ce contact avec la balle direct mais pas trop, et ce divot fin et doux.

Le mois de la gratte offre au petit jeu la part belle, et particulièrement dans l’utilisation, si systématique, de votre sandwedge.

Il n’y a pas pire à planter, avec son arête saillante, son arrondi gourmand, son offset indécent.

Quelques centimètres de mains en avant, et le massacre a lieu, la tombe se creuse et vous y poussez sans entrain la balle inerte.

À vos pieds gît votre balle, encore propre, n’ayant pas répondu à vos attentes. Le coup a bien été joué et sera compté « 1 » mais l’inertie n’a pas activé de trajectoire. La maigre vitesse de votre face de club s’est perdue dans le sol, et seul le souffle de la face a légèrement bougé votre balle.

L’opération pourra être répétée plusieurs fois, si en plus de mal utiliser votre club, vous vous précipitez pour laver au plus vite l’affront.

Il faudra alors vous souvenir des vertus de ce vieux « bounce » auquel vous aviez prêté une oreille distraite cet été pendant votre stage de petit jeu.

Ce bounce recourt à tous vos maux, permettant, shaft bien droit et semelle légère, de dompter les « lies » les plus coquins.

Vous l’avez compris, on n’en a pas fini avec le golf. Après avoir grelotté, nous voilà obligés de surnager, pour faire avancer l’élu de notre cœur, dans sa robe blanche, vers le Green promis.

Mais patience, tout vient à temps, qui sait attendre, après la gratte viendra le top, puis la petite crise de socket, celle de slice, de 3 putts… et enfin, enfin, au milieu de l’été, arrivera la partie immaculée, sans ombres, sans tâches, le bonheur tant espéré… et tout sera oublié.

Au PRACTICE avec… OIHAN Guillamoundeguy !

Spécial seniors : En route vers la cible

Du bonheur

 

 

Du bonheur

Il y’a des signes qui ne trompent pas. Quand le vert redevient vert et que les ciels fuient le gris, le golfeur a le nez qui frétille, le poignet souple et la jambe soudain plus alerte.
Il va pouvoir y retourner pour de bon. Fini les gouttes au nez, claquant le sol à chaque posture, fini la théorie des couches, qui bravent les plus grands froids;

Qu’on se le dise, le golfeur heureux est de retour.
Il est prêt à retourner galoper au pré, retrouver ses prairies, avec la fougue d’un jeune poulain, affronter ses obstacles.

Radio galaswinda, bonjour, encore une belle journée qui s’annonce, et sur la route de votre golf préféré, commencez à songer à tous ces drives majestueux que vous allez taper.
C’est annoncé, l’équipe d’entretien du parcours a fait un boulot de dingue, vos fairway sont drus, vos greens « billard », ça et là certains arbres réapprennent à bourgeonner.
Alors, courez, courez, vers votre golf adoré, vous êtes attendu.
Une soirée de lancement de la saison vous attend, nouvelle carte, nouveau chef, nouvelle ambiance, tout est fait pour que votre « maison de campagne » vous offre le plus beau des golfs loisirs.
Le tant attendu calendrier des compétitions est sorti, vous pouvez d’ores et déjà cocher dans l’agenda les immanquables.

Le délicieux « dagobert » ou le parcours enfile son « pantalon à l’envers » grâce au dessin « amusant » du Green keeper, qui se venge de tous les stableford traditionnels du reste de l’année.
Suivra en shamble à 3, (formule devenue culte) la coupe du restaurant, la coupe du directeur, la coupe de l’association, la coupe des pros, sans oublier bien sûr la coupe du pot.
On notera la coupe des ménages, laboratoire à « couple » qui chaque année rend un même et fidèle verdict (4 divorces, 3 baffes et 2 abandons au 9).
Suivront la soirée blanche, la soirée fauve, la soirée italienne, la fête de la musique, et surtout la soirée mousses à la piscine, pour les initiés.
Ah, quel bonheur, on a tellement hâte d’y être.

Retrouver les copains, enfin sortis de l’hivernage, la tête à l’air et le swing libre.
Ça va recanarder sévère, « fore right » vont crier les sliceurs, mais peu importe, le swing, pourvu qu’on ait l’ivresse de cette balle qui fuse, cette balle qui siffle, chante,… fugue.
Avec mon fidèle partenaire de double, pas un samedi matin ne va nous échapper, des morceaux de vie qui regonflent l’ego et nourrissent deux déjeuners et un dîner, selon que l’exploit est raconté à la marseillaise ou pas.

Certaines retrouveront leur place en terrasse, le cours de pilates digéré, à 13H, (pour ne pas faire celle qui ne pense qu’à ça depuis 11H30), orientation Sud, Sud-Est, crème auto-bronzante tartinée, pour la première Caesar salade de la saison, « Minuty » dans son seau à glace prêt à dégainer.
« Il était temps,… mais quel hiver affreux,… jamais vu ça en 30 ans,… les clubs sont restés au grenier,… déprimant,… désolant,… » puis après deux verres, « mais quel bonheur, quelle chance, je vais me réserver une série de leçons avec ce nouveau pro dont tout le monde parle. Je suis sûr qu’il va m’enlever le vilain slice qui me tiraille, je serai prêt pour les vacances au phare 😂.

Les enfants peuvent enfin gambader seuls, du putting green au billard, ils sont libres et responsables.
Enfin libérés des parents, le terrain de jeu est unique, des kilomètres de fairway pour envoyer des missiles, des murs de vieilles pierres pour cacher les bêtises.
Chacun trouve sa place dans ce décor organisé, manucuré et codifié.
Il reste à trouver une place pour « Milou », qu’on a dû sortir tous les jours cet hiver, grêle, neige et verglas en décor.

Milou qui n’est pas le bienvenu, avec son œil « malin », sa dent aiguisée (sur les pieds de chaise tout l’hiver) et son excrément intempestif.
Milou, qui fait partie de la famille et qui ne trouve pas sa place à l’arrière de la voiturette.
Milou qui attrape les balles sur le green, il est si intelligent – mais qui n’en a pas le droit.
Milou, il est trop chou, il faut faire quelque chose.
Vous verrez qu’un jour, ils nous inventeront une cotisation pour les chiens 😳.
Bon ok, ça fait un peu entre soi, mais bon quand on y pense,… on est un peu entre nous.
On est si bien au club, si gâtés, si protégés, si choyés.
C’est le bonheur.

Bientôt le weekend touche à sa fin, on sait déjà que la semaine sera longue, tellement longue, avant de revenir goûter le programme « enjoué » de mon club préféré.
Il faudra se faire une raison, jusqu’à l’annonce sur les ondes du programme suivant.
Sans doute une folle envie d’arriver le jeudi soir nourrira les débats, sans doute…
On en viendra même à se dire, (mais pas trop fort quand même),…
C’était quand même chouette le confinement.

Ça caille

Ça caille 


Le froid polaire a envahi la planète golf française.
Les réseaux sont formels, à grand coup de photos de parcours enneigés, les moufles sont annoncées.
Pourtant, comme chaque année , les fêtes passées, on avait dans le viseur , les fairways reverdis et les jours qui rallongent. C’était vite oublié, qu’au rythme des saisons , la raison de l’homme n’y peut rien , et que même si ,« on n’a plus d’hiver » est de mise , janvier n’est jamais vraiment une terre promise . Pas un temps à mettre un golfeur dehors .
Et pourtant , le golfeur a la peau dure et la passion tenace.
Coûte que coûte , il ira braver la bise.
Il a tout prévu , la première peau technique, les multicouches suivantes, la chaussure, fourrée et pour finir la dernière doudoune golf inesis manches libres.
Le bonnet vissé au front , le buff sur la moustache , l’hiver n’aura pas raison de bonnes résolutions.
Les séances d’entraînement d’hiver sont les scores du printemps .
Un gant à chaque main ( au secours) , la séance de practice peut commencer .
Chaque balle pèse une pierre, le tapis est une dame de béton , mon shaft en regular du X ressenti.
Mais ce n’est rien, par rapport à la liberté de mouvement, un bibendum Michelin essayant de se mouvoir.
Un bout de bois , pas un gramme de dissociation, pas un degré de rotation et encore moins d’amplitude.
Le golfeur , est attaché , contraint, puni.
Il faut toujours,essayer de faire swinguer ce club, faire voler cette balle , mais sans aucun moyen pour le faire .
La frustration guète, le juron rôde , l’abattement approche .
Rien de bon , de ce passage au supplice, tellement désiré.
Allez …. Rien de grave, le parcours est ouvert, ça ira mieux en jouant .
Le cœur à nouveau plein d’espoir , le golfeur prend la direction du 1, la chaussette déjà humide , mais le cœur gros et l’envie revenue.
Attention , à la première pente , au premier bout de rough, l’attelage golfeur/ chariot peut se retrouver à terre en moins de deux.
Ça glisse , c’est Holiday on ice, dès que le sol n’est plus plat.
Les premières balles sont jouées.
Enfin!!!!
Alors commence , la symphonie du golf en hiver , jouer, gratter, jouer, égarer , chercher , et surtout, essuyer.
La balle prend la couleur des sols, aussi sûrement qu’elle s’y enfonce , la serviette de sac , se tache irrémédiablement.
Le bas de tenue de pluie se crotte , la cuisse s’immacule , les mains glissent.
C’est jouer en faisant son petit ménage permanent.
La balle n’avance pas , l’air est si froid , le sol si mou.
Les drive sont ridicules, les coups de fer faméliques et le petit jeu ressemble à du jardinage un jour de boutures.
Les putts sautent, freinent, refusant le trou qui se propose.
Alors les scores s’affolent , bogey , double bogey sont légions, quand la règle est encore respectée et qu’on n’a pas encore décidé de « jouer sans compter ».

Ça caille et c’est pas le kif.
Alors le SMS arrive , un bon copain du sud , un ami, enfin on le pensait encore il y a quelques minutes.
Les mots fusent , toujours les mêmes, photo bleu d’azur à l’appui
« Ici, 23 degrés , on a joué en polo tout l’après-midi »
C’est décidé , vous allez enlever de votre répertoire, tous ces faux copains du sud qui se croient malins en étalant leur bonheur golfique au nez rouge de leurs potes parisiens.
Ce n’est pas juste cette histoire.
La photo suivante arrive, « une petite bière en terrasse; en pensant à toi »
Vous, vous êtes surtout préoccupés par , boire un grog pour éviter la bronchite , mettre vos mains sur le poêle pour qu’elles retrouvent leur couleur d’origine , passer le chariot au kärcher et enlever les tonnes de boues, rentrer dans la voiture sans tacher les sièges et rentrer chez vous avant la neige .
Ce n’est pas juste , je vous dis.
Pourtant, vous en aurez des choses à raconter , ce côté expérience de survie , sport extrême , cryothérapie festive .
Rien de bon au bout du compte mais le sentiment du devoir , bien fait .
C’est sur, grâce mon travail d’hiver je créerai les scores du printemps …..
Votre plan est clair et vous allez le tenir .
Le week-end prochain, il sera temps de remettre le couvert, d’ailleurs c’est la galette du club, immanquable.
Il y aura aussi l’entraînement d’équipe , par -4 , si important pour être performant en juin 🤣🤣🤣.
La blague va durer, encore quelques semaines , voir quelques mois , si la chance ou le réchauffement climatique ne s’intéresse pas à votre bout de forêt .
On ira encore au bout de cet hiver sans fin , encore une fois , le golf au cœur , pestant contre le sort en attendant « impatiemment » les jours meilleurs .
Et dans un coin de la tête , un vœu, un rêve, une quête ….
«  L’année prochaine , on s’installe dans le sud »

A ma famille d’accueil sans qui tout ça ne serait pas possible